Il est des livres bouleversants, percutants, qui vous laissent durablement marqué une fois la lecture terminée. Assurément « Terrasses, ou notre long baiser si longtemps retardé » de Laurent Gaudé est l’un d’eux.
Dans ce court mais ô combien saisissant roman choral d’un peu plus de 130 pages, l’auteur revient sur les attentats de Paris du vendredi 13 novembre 2015. A travers les dix chapitres qui composent l’ouvrage, le lecteur suit les points de vue de divers personnages depuis la matinée avant les attentats jusqu’à l’après. Après qui ne sera plus jamais comme avant. Ces personnages restent le plus souvent des anonymes. Ils peuvent être concernés de près par cette nuit de douleur et d’horreur (morts, blessés, otages, proches, forces de secours et d’intervention,…), mais certains sont plus éloignés comme celui ou celle qui se trouve sur le trottoir d’en face ou ceux qui roulent en voiture et ont juste vu passer la voiture des tueurs. Tous garderont néanmoins à jamais la marque de l’horreur. Chacun se sentira à jamais abîmé, même s’il n’a pas été blessé ni n’a perdu de proches. Laurent Gaudé fait se côtoyer les vivants et les morts. Au cœur de cette nuit déchirée par l’impensable, il décrit magnifiquement l’humanité qui éclot à travers des regards échangés, des mots murmurés à l’oreille des mourants, des mains serrées. Il plonge dans l’esprit des différents personnages, tous inventés, et nous raconte leurs peurs, leurs désirs, leurs angoisses. Magnifiquement écrit, le texte est fragmenté en paragraphes parfois très brefs. Les phrases sont courtes, incisives, tranchantes, poignantes.
Un chef d’œuvre qui rend l’oubli de cette tragédie impossible!