Dans « Une sale affaire », la réalisatrice de documentaires et autrice Virginie Linhart raconte le procès intenté contre elle par sa mère et par son ex-compagnon, appelé E., au moment de la publication de son précédent roman intitulé « L’effet maternel ». Un procès qu’elle gagnera.
Disons-le d’emblée, l’ouvrage est passionnant. Tout débute le 3 janvier 2020 lorsque Virginie Linhart, juchée sur son vélo, reçoit un appel de son éditrice l’informant que Flammarion vient de recevoir une mise en demeure de sa mère et de E., exigeant que le manuscrit leur soit envoyé. Dix jours plus tard, nouvel appel de l’éditrice. Elle informe l’autrice qu’une procédure venait d’être lancée par sa mère et par E., et qu’ils exigaient des coupes drastiques de l’ouvrage sur le point d’être publié (68 pages, soit environ le tiers du livre). Une demande qui sera refusée par Gallimard et elle-même et qui les mèneront au Tribunal.
Dans ce récit, elle raconte le choc de la nouvelle, l’organisation de sa défense, ainsi que le procès proprement dit avec les jurisprudences invoquées (celles de Brigitte Bardot, Johnny Hallyday et Mitterand, notamment) et les plaidoiries des avocats des parties. Il y question de droit d’expression et d’atteinte à la vie privée. On y voit comment la justice comprend le droit d’auteur et l’autobiographie. A qui appartient l’histoire ? Jusqu’où peut-on parler de ses proches lorsqu’on écrit sur soi ? Quel est l’effet du passage du temps ? Autant de questions essentielles abordées au cours de ce procès dont on suit les minutes avec grand intérêt.
Dans cet ouvrage, l’écrivaine évoque également sa vie (notamment son abandon par son ex compagnon alors qu’elle est enceinte de jumeaux) et le besoin d’écrire avec, sur trame de fond, les conséquences de la révolution sexuelle de 68 sur les enfants de cette génération de libertaires, enfants qui pouvaient être sexualisés trop tôt ou négligés.
Un ouvrage captivant qu’on ne parvient plus à lâcher une fois commencé.