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Test complet: Neverdead sur Xbox 360 et PS3

Connaissant une grave crise d’identité et de rentabilité, les éditeurs japonais ont, depuis quelques années, décidé de déléguer la production de certaines de leurs licences à des studios occidentaux, dans l’espoir que ceux-ci parviennent à dompter le marché occidental que les Nippons et leurs développeurs ont souvent tant de mal à cerner. Faire des jeux « à l’occidentale » afin d’endiguer la mauvaise passe que traversent les éditeurs japonais, leaders du marché il y a de cela une petite décennie, mais à la traine depuis l’arrivée des consoles HD, semble donc être la stratégie à suivre. C’est ainsi que Capcom nous a donné les fadasses « Bionic Commando » ou autres « Dark Void » rapidement tombés aux oubliettes. Mais Konami, en ayant confié le reboot de sa série phare Castlevania aux Espagnols de Mercury Steam, pour un résultat plus que probant, et ce autant au niveau financier que qualitatif, reste donc apparemment persuadé que son avenir passe par les studios occidentaux, vu que cet éditeur japonais historique n’a guère plus que Metal Gear Solid comme franchise vendeuse fabriquée sur sol nippon. Et pendant que Hideo Kojima est assigné à domicile afin de développer un maximum de jeux estampillés Metal Gear, les anglais de Rebellion se sont occupés de développer Neverdead afin de faire resplendir le sigle Konami sur l’occident. Enfin c’est ce qui était prévu…

[tab:Test]Rebellion n’est pas ce que l’on pourrait appeler un foudre de guerre. Après avoir tenté vainement de ressusciter les aliens et les predators il y a deux ans, les voilà qui tentent donc de s’attaquer aux morts vivants avec Neverdead, un jeu qui sort sur la pointe des pieds, semblant d’une pudeur maladive comme si Konami et Rebellion s’étaient de concert aperçus que le jeu n’en valait pas la chandelle. Était-ce un signe avant-coureur ? Probablement, car inutile d’y aller par quatre chemins, ce n’est pas avec Neverdead que la stratégie d’occidentalisation des éditeurs japonais va montrer son efficacité.

Tant de choses à nous dire

La crise de la quarantaine le Brice?

Lâché dans un monde pseudo futuristico-actuel, le joueur incarne donc Brice Boltzmann, stéréotype du héros vidéoludique à qui il manque une carrure et le cerveau qui va avec, tout en arborant fièrement sa cicatrice au milieu du visage ainsi que des cheveux laqués rabattus vers l’arrière, histoire d’essayer de faire jeune et cool sans bien sûr y parvenir. Crise de la quarantaine ? Pas vraiment, étant donné que l’ami Brice vient de souffler ses 500 bougies. Car Brice ne peut pas mourir. Alors qu’il s’apprêtait, il y a environ 470 ans de cela, à porter le coup fatal au seigneur des démons en compagnie de sa dulcinée, celle-ci fut transpercée de part en part par le « méchant » avant de rendre l’âme et Brice se vit confier le statut d’immortel par le seigneur des démons comme punition suprême. Il vaut mieux cela que de l’avoir éliminé, cela va de soi, car… eh bien on ne sait pas trop ! Toujours est-il que le « méchant » a disparu et que l’ami Brice passa son temps à errer en attendant une mort qui ne viendrait jamais. Heureusement, l’époque moderne lui a permis de trouver un job auprès de la NADA où National Anti-Demon Agency, chargée de s’occuper d’une immigration de démons un peu trop importante au goût de la population. Histoire de bien faire les choses, et aussi pour équilibrer le ratio homme-femme du jeu, Brice travaille en équipe avec une certaine Alex, dont le quotient intellectuel et le côté stéréotypé sied parfaitement à Brice. Alex est, soit dit en passant, le cliché absolu du personnage féminin inutile et dont le character design reflète une certaine approche discutable de l’image de la femme dans les jeux vidéo. Car partir en mission quasi-militaire en robe ultra courte et bottes montantes, il faut quand même le faire. Mais bon, cela est compensé par sa prétendue indépendance puisque les avances nombreuses de Brice seront toutes repoussées d’un revers de main tout au long de l’aventure.

Puisqu’ils ne sont pas payés pour coller des gommettes, nos deux héros doivent apparemment combattre une recrudescence de démons immigrés venus dominer le monde, ou quelque chose de la sorte, à deux bien entendu, car il serait totalement inutile de faire appel à l’armée qui est apparemment en vacances dans l’univers de Neverdead. Nos deux héros feront donc quelques rencontres durant leur aventure, notamment avec Nikki, une chanteuse pour adolescentes se produisant dans un musée d’histoire naturelle et qui réussit l’exploit d’être encore moins intéressante que notre duo de choc, et également le chef de l’agence anti démon dont le charisme est comparable à celui d’une table IKEA.

Le character design est...désespérant

Indépendamment du fait que la narration est catastrophique, que le pseudo second degré est raté et qu’à peu près rien ne fait sens dans Neverdead dès l’instant où l’on se met à réfléchir, ce jeu semble quelque peu symptomatique des problèmes que rencontre l’industrie du jeu vidéo pour créer des univers, des récits, des personnages ou des situations crédibles et intéressantes. On pourra toujours dire que l’histoire et la narration ne sont pas l’apanage principal du média vidéoludique, mais il semble particulièrement troublant que l’on continue à penser que, alors que l’âge moyen du joueur est de passé 30 ans, on puisse tout simplement créer des histoires, des univers et des personnages qui peuvent à la limite plaire tout au plus à un public pré-adolescent. Il serait grand temps que le média vidéoludique en général prenne au sérieux  le fait qu’un jeu d’action nécessite au moins une personne s’occupant du scénario et des dialogues, et ne pas toujours laisser cet aspect-là aux stagiaires non-rémunérés. Neverdead semble vraiment être une sorte de cliché de ce que les jeux vidéo peuvent faire de pire lorsqu’il s’agit de raconter une histoire, semblant même par moment prendre le joueur pour un abruti car de toute façon, il ne s’intéressera pas à l’histoire dès lors que le gameplay est suffisamment bon pour qu’il ne lâche pas la manette.

Faire des pieds et des mains

Ainsi, le gameplay de Neverdead, c’est donc là où se situe son originalité, où se situe la substantifique moelle du jeu. Afin de ne pas être trop dur d’entrée de jeu, on dira que le concept original paraissait plutôt prometteur, même s’il semblait être un défi de taille pour les développeurs : jouer sur l’immortalité de Brice plus que sur son intellect afin d’apporter une bonne dose de nouveauté dans le genre du TPS. Brice ne peut donc pas mourir en tant que tel, mais il peut se faire démembrer par les ennemis. Ses jambes, ses bras et sa tête peuvent donc être arrachés à son corps lors des combats. Une idée intéressante, certes, mais exploitée de manière maladroite. Dès le moment où les membres se détachent, il est possible de les rattacher en effectuant une roulade afin de les recoller comme par magie. Quant à sa tête, lorsqu’elle se sépare du reste, le joueur en prend le contrôle et doit rouler pour rentrer en contact avec les autres membres arrachés afin de se reconstituer. Mais être immortel ne signifie pas que l’on ne peut pas perdre, car dès que les ennemis vous attaquent, des petites créatures informes sillonnent le champ de bataille avec pour but d’aspirer votre tête dans leurs entrailles. Si elles parviennent à leur fin, un QTE d’une banalité rare apparait afin de sauver la tête de Brice d’une éternité passée dans les entrailles de ces bestioles. Si vous ratez les QTE, c’est game over. Un aspect extrêmement frustrant du jeu. L’autre problème, c’est que les démembrements sont incessants et qu’il faut en permanence recoller les morceaux. On passe presque plus de temps à faire des roulés-boulés afin de se rabibocher qu’à combattre les ennemis en tant que tel. Et même s’il est possible de faire repousser les membres perdus en appuyant sur le stick gauche une fois une jauge d’énergie remplie, cela ne sauve pas un aspect du jeu qui devient rapidement frustrant.

Cette situation risque de vous arriver très souvent...

Certains passages vont un peu plus loin dans l’originalité, forçant le joueur à s’arracher la tête afin de déambuler dans des passages réduits ou alors pour résoudre des énigmes. D’autres vous obligent à vous faire électrocuter volontairement afin de servir de fil électrique et d’autres encore, particulièrement mal gérés, vous obligent à vous servir de Brice comme d’une torche humaine afin d’éclairer votre chemin. Tout cela semble sympathique et original sur le papier. Mais ces phases sont trop peu nombreuses, gérées de manière maladroite et surtout totalement sous-exploitées puisqu’elles ne représentent qu’une poignée de phases dans le jeu. Au final, on fait toujours la même chose dans Neverdead. On arrive dans une salle ressemblant furieusement aux précédentes, des ennemis apparaissent, on s’en débarrasse après un combat plutôt laborieux, puis on passe à la salle suivante. Parfois, le jeu ne nous gratifie d’une cut-scene avec des dialogues au ras des pâquerettes que pour casser le rythme plutôt faiblard. Les quelques bonnes idées se noient dans un océan de maladresse et de game design répétitif et frustrant. C’est toujours la même chose, les mêmes salles, les mêmes situations, les mêmes sensations et les mêmes ennemis.

La guerre des clones

Les ennemis, parlons-en. Dès les premières minutes, on a déjà affaire à deux types d’ennemis, à savoir une sorte de chien-grenouille géant portant un masque, ainsi qu’une sorte de créature à trois jambes qui, à la place de la tête, est dotée d’un bras surplombé d’une lame. Il est difficile de décrire des créatures qui ne ressemblent à rien, car c’est malheureusement le cas dans Neverdead. Mais au-delà de cet aspect, ce sont ces deux mêmes ennemis qui reviennent inlassablement tout le long de l’aventure, sous différentes couleurs et avec certains attributs spéciaux. Les mêmes, toujours et encore les mêmes. Il faut attendre le dernier chapitre avant d’avoir suffisamment de créatures différentes pour que le jeu propose un semblant de diversité. Mais il est malheureusement trop tard, le mal est déjà fait. Quant aux boss, on dira que certains sont plus ou moins réussis, quand d’autres sont pour le moins étranges, voir repoussant, dans le mauvais sens du terme. Le character design général de Neverdead est globalement de mauvais gout et d’une pseudo originalité douteuse.

Certains environnements sont loins d'être moches

N’y a-t-il donc rien pour sauver Neverdead du naufrage ? Et bien si quand même. Le jeu jouit d’un degré de finition relativement correct et la plupart des zones sont par exemple dotées de décors destructibles permettant au jeu, par moment, de dégager une certaine dose de fun. La réalisation visuelle est elle aussi plutôt correcte et le jeu ne rencontre que très peu de problèmes techniques. Et même s’il en va tout autrement de la musique et des dialogues, le jeu reste plutôt agréable à regarder par moment. On voit au travers de ces aspects que Rebellion a eu un budget relativement conséquent afin de développer son jeu qui ne semble pas avoir été sorti à la va vite. Il réussit même à être relativement fun par moments, mais ceux-ci sont de courte durée et la frustration finit toujours par reprendre le dessus. Et, avec elle, l’envie de balancer le pad par la fenêtre.

En résumé :

note-25-multiDe bonnes idées, voilà ce que l’on retiendra de Neverdead. Avec son concept de personnage immortel, le studio Rebellion a courageusement tenté quelque chose d’original et de plutôt risqué. Mais pour faire un bon jeu, les idées ne suffisent malheureusement pas. Etant tour à tour original, frustrant, répétitif, inintéressant et désespérant, Neverdead rate malheureusement quasi tout ce qu’il entreprend, trahissant un game design qui semble être l’indicateur d’une équipe de développement ne sachant pas que faire des idées sensées être au centre de l’expérience. Si l’on rajoute à cela l’une des histoires les plus nulles, inintéressantes et mal narrées de ces derniers mois et des personnages aussi plats que stupides et unidimensionnels, il en résulte un jeu que l’on se force laborieusement à finir et qui, malgré certains passages sympathiques et une réalisation visuelle relativement correcte, ne parvient jamais à convaincre. Au sein du monde impitoyable des jeux d’action, Neverdead sera vite oublié comme le témoin de la difficulté à innover dans ce domaine si rigide.  Certains s’en arracheraient les cheveux, Brice lui, s’en arrache simplement la tête.

Mathieu Lanz

+ Quelques idées originales, plutôt joli par moment, techniquement honête, certains passages fun
Gameplay frustrant, répétitif, character design atroce, histoire et dialogues médiocres, idées mal exploitées
[tab:Fiche]
Type: Action/TPS [xrrgroup] [xrr rating=4/5 label= »Graphismes: »] [xrr rating=2,5/5 label= »Bande Son: »] [xrr rating=2,5/5 label= »gameplay: »] [xrr rating=2/5 label= »scénario: »] [xrr rating=3,5/5 label= »Durée de vie: »] [/xrrgroup]
Editeur: Konami
Age/PEGI: 18+
Sortie: 02.02.2012
Multijoueurs: 4 joueurs
Plates-formes: Xbox 360/PS3
Testé sur: Xbox 360
[tab:Images] [nggallery id=141] [tab:Vidéo] [youtube]http://www.youtube.com/watch?v=ygAC7MNAMOc[/youtube] [tab:END]

A propos rivera

Rédacteur en chef et journaliste RP, ma passion pour les jeux vidéo et la technologie ne faiblit pas depuis mon adolescence, qui me semble pourtant bien lointaine. Un recul cependant intéressant, puisqu'il me permet de jauger les nouveautés avec un regard plein d'expérience, couplé à une envie d'écrire de tous les jours.

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